mardi 26 juillet 2011

Conditions de vie des Roms : Médecins du Monde tire la sonnette d’alarme

Presque un an après le discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy, Médecins du Monde dénonce une aggravation de la précarité des Roms en France.  

Dans un gymnase de Choisy-le-Roi, août 2010. ©Flickr Alain Bachellier
Ils vivent dans des bidonvilles ou des squats, dans des caravanes délabrées ou des cabanes, pour la plupart sans eau ni électricité. En France, les expulsions répétées des Roms, s’accompagnant le plus souvent de la destruction de leurs campements et de l’absence de proposition de relogement, les ont condamné à des conditions de vie extrêmement précaires. C’est ce que dénonce le rapport de Médecins du Monde (MDM), publié le 26 juillet, presque un an après le discours de Grenoble – le 30 juillet 2010 -, au cours duquel Nicolas Sarkozy avait fait de ces évacuations et des démantèlements des camps un des objectifs de son mandat. "Leurs besoins les plus vitaux, tels que l’accès à l’eau potable ne sont pas satisfaits, certains nous ont même dit avoir faim, dénonce le Dr Jean-François Corty, directeur Mission France de MDM. Dans certains campements, nous avons développé des opérations similaires à celles des zones de conflit. Par exemple, en Seine-Saint-Denis en 2009, nous avons distribué du matériel de première nécessité."

Rupture de soins

Sur 15 000 Roms présents en France, 9 000 auraient été expulsés depuis 2010 selon le ministère de l’Intérieur, 10 000 selon MDM. Certaines familles rencontrées par l’ONG ont même été expulsées six fois de leurs lieux de vie au cours des six derniers mois. Les résultats de l’enquête de MDM sur la couverture vaccinale, réalisée auprès de 281 Roms entre juillet 2010 et juin, dans quatre grandes villes (Nantes, Bordeaux, Marseille, Strasbourg) font froid dans le dos. Seuls 8% ont un carnet de santé attestant que leurs vaccins sont à jour. La majorité des personnes rencontrées ne sont donc pas immunisées contre les maladies courantes et même mortelles. "La violence des expulsions entraîne une rupture de l’accès aux soins", précise le Dr Jean-François Corty. Les indicateurs de santé sont tout aussi catastrophiques. Par exemple, seule une femme sur dix est suivie durant sa grossesse, la mortalité néo-natale (0-1 mois) est neuf fois supérieure à la moyenne française et les cas de tuberculose sont extrêmement nombreux. "Il y a trois explications à cette situation, explique le Dr Corty. Des manques de sensibilisation et d’information sur les lieux de vaccination, ainsi que des expulsions répétées qui rendent le travail des médecins quasi-impossible."

Après une expulsion à Grenoble, septembre 2010. ©Flickr T.
Effets de la politique migratoire

Pour MDM, c’est la politique migratoire qui a des effets collatéraux catastrophiques sur la santé des Roms. "Il y a aujourd’hui une véritable volonté politique de les empêcher de rester sur le territoire français, en utilisant la médecine comme arme contre les flux migratoires, dénonce le Dr Corty. C’est un non-sens par rapport à l’éthique médicale." L’organisation pointe également du doigt une "politique affichée de restrictions des droits". L’aide médicale d’Etat (AME), dont dépendent les Roms est en effet devenue payante – 30 euros de droit d’entrée - depuis le 1er mars. 77% d’entre eux n’ont donc pas de droits ouverts à l’AME.
Le rapport va être remis dans les prochains jours aux autorités publiques et de santé. Alors, quelles sont les solutions concrètes envisageables pour améliorer le quotidien des Roms ? "Il faut arrêter les expulsions, laisser les médecins travailler, leur faciliter l’accès au travail et accélérer leur processus d’intégration car ce sont des citoyens comme les autres", conclut le Dr Corty. L’alerte est déjà lancée sur la préparation d’une nouvelle vague d’expulsions massives cet été.

J.S.

1 commentaire: