Le jazz "risque fort de s'appauvrir jusqu'à disparaître si rien n'est fait en sa faveur". Chanteurs, musiciens ou encore politiques tirent la sonnette d'alarme et demandent des "États généraux du jazz". L'appel a été lancé aujourd'hui dans Libération, au moment où les festivals de jazz débutent partout en France.
Le saxophoniste Michel Portal © Flickr Nico Fontaine
"Nous demandons solennellement à Monsieur Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture, d'organiser la tenue d'états généraux du jazz afin de redéfinir ensemble, avec tous les acteurs de cette filière, les politiques que nous voulons voir mises en œuvre pour assurer la survie d'un secteur musical qui fait partie intégrante de notre paysage culturel".
Les signataires de l'appel "Pour des états généraux du jazz" viennent de tous bords : des musiciens comme le saxophoniste Michel Portal, la chanteuse China Moses, fille de Dee Dee Bridgewater, ou le pianiste Laurent Coq; des producteurs comme François Zalacain, fondateur du label de jazz indépendant Sunnyside Records; et des politiques, à l'instar de Jacques Delors.
Contraintes budgétaires
Tous déplorent le fait que "les droits sociaux des artistes ont fondu, marginalisant des centaines d'artistes depuis les directives de 2008. Les producteurs - du moins ceux qui n'ont pas mis la clef sous la porte - ne parviennent plus à vendre de disques. Les salles comme les festivals sont soumis à des contraintes budgétaires toujours plus insurmontables et ont, par conséquent, de plus en plus de mal à refléter et relayer la très grande diversité du jazz français." Les signataires, dont le critique Michel Contat, chroniqueur à Télérama, ajoutent: "Il en va de même pour la presse spécialisée", notamment Jazz Magazine.
Pour eux, "Cette situation est d'autant plus inacceptable que le jazz n'a jamais été aussi riche et foisonnant". Et ils se remémorent avec nostalgie cette France "terre d'accueil privilégiée pour de nombreux hérauts de free-jazz" soulignant que "grâce à la diversité de sa société, elle a donné au jazz-fusion quelques uns de ses meilleurs instrumentistes." Le saxophoniste Archie Shepp, parrain de Jazz à Porquerolles, vénérable emblème franco-américain du free-jazz, s'étonne lui aussi de l'appauvrissement des jazzmen, tandis qu'il souligne par ailleurs les sommes folles gagnées par les rappeurs.
Au moment où les festivals de jazz ouvrent leur portent partout en France - à Marciac vendredi, à Avignon pour Tremplin Jazz la semaine prochaine et à Porquerolles dès le 15 août - cet appel devrait en faire jazzer plus d'un. Reste à voir s'il aura de l'écho.
C.E.
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